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21 février 2007 3 21 /02 /février /2007 00:50
Etienne DOUSSAIN                                                               Noisy, le 15 février 2007
Adjoint au Maire
Président du Groupe des Elus communistes
………………………
93160 Noisy le Grand                         M. le Président
                                                           Commission d’enquête
                                                           Préfecture de la Seine Saint Denis
                                                           Direction du Développement durable
                                                           Et de l’Aménagement
                                                           Bureau de l’Urbanisme et des Affaires foncières
                                                           1, esplanade Jean Moulin
                                                           93007 BOBIGNY Cedex
 
                                                          A l’attention de M. Jean Pierre CHAROLLAIS
                                                                              Et de ses collègues
Monsieur le Président,
 
 
La consultation des noiséennes et des noiséens à l’occasion de deux enquêtes publiques sur le projet d’aménagement du quartier des Bas Heurts, dit ZAC du Clos aux Biches arrive à son terme.
 
Par deux fois, l’une à la Fabrique, l’autre lors d’une visite du quartier avec des représentants de ses habitants, nos rencontres m’ont permis d’exposer mon sentiment général sur l’utilité de ce projet de ZAC et je vous en remercie.
 
Comme j’ai pu vous l’indiquer de vive voix, je ne partage pas l’ambition, la conception démesurée et la cohérence de ce projet d’aménagement. Restant constant dans ma critique, comme en témoignent les différents documents que je vous ai adressés par mail (copies jointes à la présente), je crois très sincèrement que la démonstration de l’utilité publique n’est pas faite et qu’elle ne peut pas l’être en raison des zones d’ombre qui persistent après examen. 
 
Il me semble, d’ailleurs, opportun de souligner immédiatement que certains effets d’annonce, ceux du type « il y aura 30% de logements sociaux » ne rendent pas propice une analyse sereine et entretiennent une confusion que je juge savamment réfléchie sinon organisée. En étant sévère, j’irais même jusqu’à dire que l’utilisation tendancieuse de cette véritable et dramatique question, question qui minent la vie quotidienne de trop nombreux habitants de ce pays, n’est pas loin d’être indigne si l’on en juge par la critique sévère du rapport annuel de la fondation Abbé Pierre sur le logement.
 
Sur l’ambition : la volonté de réaliser une opération d’aménagement d’ampleur en prévoyant d’emblée une mixité sociale n’est pas en soi contestable dans cette partie de la ville. Vous avez pu noter, d’ailleurs, que les habitants de la Varenne, et plus précisément ceux des Bas Heurts, ne refusent pas, pour la majorité d’entre eux, une évolution urbaine de leur quartier.
 
Au delà des remarques passionnées de tel ou tel, en particulier sur les registres de l’enquête publique, il est remarquable de constater que les plus actifs défenseurs d’une autre alternative n’ont absolument pas gommé cette nécessité, pas plus, d’ailleurs, que celle de la construction de logements sociaux, cela même alors que Noisy le Grand n’a pas à craindre de pénalités au titre de la loi SRU compte tenu des réponses apportées depuis de nombreuses années sur ce plan.
 
Non, la critique principale sur l’ambition de ce projet est bien dans sa logique générale, logique marquée durablement par celle qui a prévalu lors de la construction du secteur I de la ville nouvelle de Marne la Vallée.
Celle-ci, vous l’aurez perçu, repose sur le principe d’une occupation massive d’un espace libéré préalablement de tout occupant. Autrement dit, on rase d’abord et on construit après.
C’est cette même logique, de plus, qui ne permet même pas de reloger temporairement avec un bail précaire, par exemple, des habitants qui pourraient le nécessiter, même si ces solutions ponctuelles restent toujours imparfaites. Je puis, néanmoins, témoigner sur ce point que les expulsions ne manquent pas dans notre ville comme ailleurs, hélas.
 
Donc cette logique ne fait que poursuivre celle qui a présidé aux destinées de la ville nouvelle. Plus encore s’il faut le préciser, cette logique suit scrupuleusement les principes du schéma directeur de la ville nouvelle puisque le projet d’aménagement, comme l’objet de l’enquête le stipule, n’évoque pas les friches trentenaires de Maille Horizon.
 
Autrement dit, là encore, poursuivons le projet initial d’aménagement du secteur I en préservant une zone d’activités économiques tertiaires en gelant, avec l’accord d’Epamarne, de fait, un espace foncier majeur pour d’hypothétiques entreprises sauf pour l’école de police et le lycée…
 
Or, cette ambition, si juste soit-elle au regard de l’emploi et des ressources de la ville comme la TP, malgré ses fluctuations politiques actuelles, part du postulat que Noisy le Grand, son image redorée, l’important lobbying pour la venue du lycée international y participant, doit être potentiellement la ville attractive de l’Est parisien.
 
Nous savons dorénavant que cette ambition a été sérieusement écornée par la réalité économique générale et, qu’à moins de se livrer à un intense « dumping », il n’y a pas d’attractivité démontrée de Noisy le Grand en particulier par rapport à d’autres communes de l’Est Parisien.
 
Il est vrai que l’autoroute A4, le RER A et la ligne SNCF sont des atouts, à la mesure toutefois de leur respectif encombrement actuel, mais d’autres villes peuvent y prétendre dans le même espace géographique. Même si cette dimension est plus du ressort du PLU actuellement à l’étude, il convient de pointer néanmoins cet aspect en évoquant l’ambition du projet.
 
En effet, le rapport n° 004632-01 de novembre 2006 «sur le retour au droit commun des secteurs 1 et 2 de la ville nouvelle de Marne la Vallée »[1] montre bien quelle est l’ambition réelle de Noisy le Grand.
En effet, selon les termes de ce rapport, «le cas de Noisy le Grand est différent de ses voisines du Val de Marne parce que les terrains acquis par l’Etat et l’Epamarne n’y ont pas encore été utilisés et offrent d’importantes possibilités de construction tant en matière de bureaux que de logements. Certains sont situés dans les ZAC en cours, d’autres en dehors. Cette capacité serait de l’ordre de 200 000 mètres carrés de bureaux et de 100 000 mètres carrés de logements, avec possibilité de jeu d’une catégorie à l’autre (souligné par mes soins) ».
 
Ainsi l’ambition de la commune, « qui souhaite un transfert clair et immédiat des responsabilités de l’aménagement pour ces terrains », est bien de reprendre la main pour achever, sur un plan municipal, ce qu’Epamarne n’a pas su ou voulu faire en plus de 20 ans. Cette reprise éventuelle, en tout état de cause, ne devrait pas invalider les principes originels des aménagements prévus, or ces derniers peuvent s’effectuer, « avec possibilité de jeu d’une catégorie à l’autre ».
 
En d’autres termes, l’ambition de la ZAC des Bas Heurts pourrait parfaitement coïncider avec celle du schéma directeur de la ville nouvelle et de son secteur 1, en opérant dans le cadre d’un urbanisme paisible et en tenant compte de l’expérience acquise, à savoir en mixant heureusement, pour le coup, les préoccupations légitimes de chacun, économiques pour la ville, de cadre de vie pour les habitants.
 
Donc, j’en suis convaincu, une autre ambition était et reste possible.
Sur la conception démesurée : L’idée de réaliser la construction de 1500 logements, ce chiffre ayant été d’ailleurs revu à la baisse, me semble-t-il, a été plaquée sans qu’il soit tenu compte de l’existant que pourtant la ville ne pouvait méconnaître en raison des derniers permis de construire qu’elle avait accordés .
Pire encore, il est possible de dire qu’une certaine désinformation sur la réalité de ce quartier a été organisée (mauvais état des maisons, terrains abandonnés, etc.…).
 
Il y a dans la présentation du projet, lui-même, l’idée sous-jacente que rien ne peut être conservé et qu’il convient de raser purement et simplement l’existant, faisant fi, de fait, des drames humains que cela générera au nom d’un intérêt général qui n’est pas démontré.
 
Cette conception est exactement la même que celle qui a prévalu lors de la réalisation de la ville nouvelle. C’est la même qui a prévalu pour la ZAC du Clos Saint Vincent en son temps.
Pour autant, la nécessité reconnue par tous d’aménager ce quartier ne passe pas obligatoirement par une méthode identique, surtout dans une ville qui n’a pas encore « digéré » les quartiers nouveaux que l’aménageur Epamarne a conçu en dehors de tout maîtrise municipale.
 
Pourquoi donc la commune de Noisy le Grand devrait reproduire, sous sa responsabilité, une opération de densification dont elle souffre encore dans d’autres périmètres et qu’elle dénonce régulièrement en demandant l’intervention de l’Etat (GPV et ANRU, aujourd’hui) ?
 
Pourquoi faudrait-il, au nom d’un soi-disant intérêt général, créer un nouveau quartier de toute pièce, sans prendre en compte pour l’occasion la réflexion utile des urbanistes sur le même sujet, en implantant, non pas 30 % de logements sociaux mais bien 70% d’accession à la propriété dans un contexte de spéculation foncière que chacun connaît en Ile de France ?
 
Et cela, sans vouloir imaginer une autre conception de l’habitat collectif et individuel qui pourrait permettre de joindre efficacement un autre quartier dont la démesure n’est plus à prouver au-delà de la prouesse architecturale (Palacio d’Abraxas et le Mont d’Est) !
 
Or, les noiséens le savent bien, c’est aussi la coupure architecturale entre les différents quartiers de la ville, coupure renforcée, certes, par la tranchée du RER et l’autoroute A4, qui génère une partie du mal vivre et des difficultés des habitants de Noisy le Grand au-delà des réalités socio-économiques.
 
Et c’est cette coupure avec une logique inhérente de quartier fermé géographiquement sur lui-même qu’il convient de ne pas reproduire, surtout pas par la densification d’une zone spécifique sans liaison organisée avec le reste de la ville.
 
Enfin, s’agissant de la démesure, je prétends que seul le seuil de la rentabilité économique de l’opération pour la Socaren et, par ricochet, pour les promoteurs, a décidé de la taille de l’aménagement éventuel. Afin que l’opération soit attractive et permette de dégager des marges pour la société d’économie mixte de la ville, il a été décidé que 1500 logements étaient le minimum à atteindre. Je vous laisse apprécier sur ce point les conséquences possibles concernant la hauteur de immeubles.
 
Pourtant, cela m’a été confirmé par M. Dréan en son temps, même si ce dernier sans doute ne le confirmera pas aujourd’hui, il aurait été possible de réaliser une opération plus petite et économiquement viable. Cherchait-on un effet d’annonce politique plus important ? Voulait-on marquer les esprits sur les talents d’aménageur de la municipalité ? Faire mieux qu’Epamarne ? Tout cela vraisemblablement !
 
Donc, là encore j’en suis convaincu, une autre conception était et reste possible.
 
 Sur la cohérence : Dans la foulée de mon propos précédent, il est évident que l’aménagement du quartier des Bas Heurts doit tenir compte de l’existant et des enjeux du développement de Maille Horizon.
Il n’a jamais été dit que les deux ZAC, celle du CUR, l’une d’Etat et celle du Clos aux Biches, l’autre municipale, ne pouvaient pas permettre de concevoir un urbanisme qui conjugue activités économiques, logements collectifs et individuels.
C’est une posture politique qui en a décidé autrement, au mépris, me semble-t-il, d’un réel intérêt général.
Comme indiqué précédemment, il n’a jamais été dit non plus que la ZAC du CUR devait être consacrée exclusivement à l’activité tertiaire.
 
La ville avec deux autres communes voisines ayant, comme en témoigne le rapport joint en annexe, dès le 24 octobre 2002, demandé à ce que soit mis « fin à l’action de l’Epamarne sur leur territoire et d’y reprendre l’entière responsabilité de l’urbanisme opérationnel », il est légitime de s’interroger sur la cohérence du projet de ZAC du Clos aux Biches sans prévoir d’emblée son lien avec celle du CUR dont la ville demande de reprendre la gestion depuis 5 ans !
D’ailleurs, l’accélération du processus dans le courant de l’année 2006 démontre à lui seul qu’une nouvelle cohérence devra être débattue.
 
A ce jour, la seule cohérence perceptible est bien celle qui consiste à maintenir la logique antérieure, celle de la conception de la ville nouvelle. Or, la même ville, aujourd’hui, s’échine à obtenir l’aide de l’état pour des opérations de renouvellement urbain qui concerne … des quartiers de la ville nouvelle.
 
De mon point de vue, la densification proposée, sans nuance et sans alternative, a de fortes probabilités de reproduire les mêmes erreurs, erreurs qu’il faudra que les générations futures traitent … dans 20 ans ! En se posant, alors, la question de la nécessité de mettre en cohérence quartier des Bas Heurts et quartier du Mont d’Est, peut-être ? A mon avis, que de temps perdu et de développement « durable » loupé ! 
 
Je n’ignore pas que l’objet de l’enquête ne prévoit pas d’intégrer a priori cette dimension mais comment pourrions nous ne pas la pointer tant son intérêt général est évident.
 
Dans cet esprit, je salue le travail remarquable réalisé par des élèves de l’école d’architecture de la Villette qui montre bien qu’une autre cohérence est, non seulement, possible mais nécessaire pour favoriser un nouvel équilibre urbain à Noisy le Grand et plus précisément dans cette partie de la ville.
 
Effectivement, la démonstration d’une autre densification urbaine a été faite. Plus encore, demandée par les plus actifs des habitant du quartier, elle confirme totalement que le refus du projet municipal n’est pas lié à un refus de densification mais bien à la qualité de cette dernière.
 
S’agissant encore de la cohérence, je ne crois pas que l’on puisse passer sous silence l’impact d’une décision municipale selon l’environnement dans lequel elle va s’exercer, pas plus, d’ailleurs, en affectant d’ignorer ou en les minimisant ses conséquences immédiates sur d’autres paramètres qui concernent au premier chef les habitants.
 
Je pense, bien sûr, à l’impact d’une telle ZAC sur le quartier voisin de la ville de Brie. Je pense, en outre, aux conséquences sur la circulation urbaine et sur les transports collectifs.
Si, en soi, le principe d’un renouvellement urbain de ce quartier n’est pas discutable, comment imaginer que les habitants de Bry ne puissent pas être intéressés par l’ampleur de l’aménagement tant les usages actuels des habitants de ce quartier de Noisy les concernent déjà ?
 
C’est vrai pour la station de RER de Bry dont chacun connaît les insuffisances en terme de fréquence même si cette difficulté sera sans doute solutionnée un jour (mais quand ?).
 
C’est vrai pour le réseau routier intercommunal et départemental (route et pont de Neuilly).
 
C’est vrai enfin, certainement, sur la question du traitement des eaux usées ou encore des eaux pluviales sur un coteau de la Marne.
 
Rien, me direz vous, d’insoluble a priori ! Toutefois, marque évidente d’absence de cohérence, rien de cela n’a été, à ma connaissance, discuté, pensé, voire construit dans une logique d’intercommunalité sous-jacente, à défaut d’être structurelle.
 
Or, c’est ainsi, par exemple, qu’un Préfet de Région, quelques années plus tard, propose, sous le thème de la réouverture ou non du chantier de l’autoroute A103, de réfléchir à des alternatives routières ou de transports en commun du cœur de Marne la Vallée à la ville préfecture de la Seine Saint Denis !
Peut-être parce que l’on a repoussé à demain ce qu’il convenait de prévoir aujourd’hui ? Non, décidément la cohérence et l’intérêt général du projet sont loin d’être prouvés.
 
Je souhaite, enfin, aborder un autre point qui me tient à cœur, celui du logement social, mais aussi de l’accession à taux zéro.
 
Je considère qu’un véritable « procès en sorcellerie » est fait à ce sujet en méconnaissance totale de la réalité de cette douloureuse question pour de nombreuses personnes, mais plus perfidement ou, pour le moins, très maladroitement pour d’autres.
 
Il est absurde d’aborder la question de la ZAC par la seule approche de « pour ou contre  le logement, en particulier social ». Il n’a jamais été question pour la formation que je représente sur le plan municipal de refuser la réalisation de logements nouveaux à Noisy le Grand et, bien évidemment, de refuser la construction urgente, comme dans tout le pays, de logements sociaux.
 
Je suis favorable à un grand service public du logement et à une réelle application de la loi SRU s’agissant de la répartition du logement social pour éviter à la fois, l’effet ghetto par la concentration de personnes en grandes difficultés sociales et, à la fois, pour permettre la réalisation d’un habitat respectueux du cadre de vie et de ses habitants.
 
Cela étant, l’examen des politiques publiques qui se sont succédées sur la difficile question du logement montre aujourd’hui plus qu’hier leurs limites, sinon leur échec.
 
On ne peut se contenter d’effets d’annonce électoraux sur un tel sujet. La question n’est pas « M. le Maire de Noisy le Grand va construire du logement social », non, la question est sous quelles conditions et accessibles à qui !
 
Pour fonder mon affirmation, je me contenterai de citer deux interventions récentes dans la presse quotidienne de M. Patrick Doutreligne, délégué général, de la fondation Abbé Pierre[2].
 
La première dit ceci : « La Fondation Abbé Pierre en éditant son douzième rapport sur le mal-logement a révélé cette année un phénomène inquiétant qui, en s’élargissant au point de devenir une préoccupation majeure de notre société, va au-delà du mal-logement : le non-logement.
Les personnes mal logées sont plus de 3 millions à vivre dans des logements surpeuplés, notoirement inconfortables (c’est-à-dire sans wc intérieur, sans salle de bains et sans chauffage) ou se retrouvent dans des situations sans domicile personnel ; hébergées dans des structures d’urgence, contraintes de se réfugier dans la famille plus ou moins proche ou chez des amis.
Mais l’état du non-logement est plus grave encore, car il signifie que ces personnes vivent sous tente, dans des cabanes, dans des garages, des caves, des voitures, des soupentes, des abris de fortune.
Toutes ces situations prennent des proportions inquiétantes, concernent des publics de plus en plus variés, représentent une absence de droit et sont les symptômes d’une société qui va mal »
Peut-on accepter dans le 5e pays le plus riche du monde d’être confronté au XXIe siècle à des situations aussi intolérables ?
De nombreux témoignages associatifs ou de travailleurs sociaux nous alertent sur cette évolution, l’augmentation de domiciliations administratives et postales confirme cet état de fait, l’inscription à l’école de nombreux enfants sans adresse révèlent ces aberrations.
Pouvons-nous accepter de voir encore des gens vivre dans les bois, sur le périphérique parisien, dans des baraques de chantier ou dans des campings à l’année ? Le non-logement ne représente pas seulement une absence de logement mais un déni bafouant nos principes républicains d’égalité et de justice. Les conséquences sociales sont considérables du point de vue de la santé, de la sécurité, de la scolarité des enfants, de la perte de repères et représentent un facteur aggravant de l’exclusion dont sont victimes ces personnes et ces familles.
Faut-il que ce phénomène s’accentue, que la souffrance et la désespérance de ces individus rejaillissent sur nous pour que s’impose à chacun de nos responsables locaux et nationaux de modifier les politiques du logement de notre pays ? ».
La seconde dit ceci : «parler de crise lorsque les chiffres de la construction battent des niveaux records de mise en chantier depuis vingt cinq ans peut paraître surprenant. Les responsables politiques se félicitent de cette évolution et concluent qu’en maintenant cette inflexion, les problèmes se résoudront à brève échéance, grâce aux 410 000 mises en chantier en 2005 et 416 000 en 2006.
Pourtant une analyse plus fine permet d’être plus critique. Ce résultat mésestime le fait que le type de logements construits ignore la réalité économique de la demande. Les bons chiffres de la production globale reposent essentiellement sur l’accession à la propriété grâce à des taux de prêts historiquement bas et à la construction locative privée dopée par des avantages fiscaux exorbitants consentis aux investisseurs, sans contreparties sociales.
Le coût pour l’Etat de ces avantages fiscaux est comparable (Robien), voire supérieur (Borloo populaire) au coût du logement social …
L’augmentation de logements sociaux annoncée par le gouvernement ne semble pas perceptible par la population et pour cause, elle est pour une très forte proportion liée à des logements sociaux dits « intermédiaires », inaccessibles pour la quasi-totalité des demandeurs. Elle est aussi pour partie liée à une augmentation de la délivrance des agréments de construction, mais dont les habitats ne seront disponibles que dans deux ou trois ans.
De plus, l’analyse détaillée de cette production révèle que seulement 23% des logements construits concernent les deux tiers des ménages les plus modeste et, conséquemment, que les 77% restant intéressent le tiers des ménages les plus aisés.
Le décalage est d’autant plus fragrant que la demande se précarise. Le marché de l’emploi offre majoritairement des contrats précaires, CDD, temps partiel ou contrats aidés, en inadéquation avec le marché du logement dont les prix augmentent de façon inconsidérée, accompagnée d’une inflation d’exigences et de garantie de la part des bailleurs privés.
Le marché immobilier se ferme progressivement aux couches populaires qui n’ont d’autres recours que le logement social et ses 1,3 million de demandeurs en attente. Une meilleure orientation des dépenses publiques vers les catégories sociales modestes doit impérativement s’inscrire et permettre de rétablir le sens des solidarités. »
Cette lecture édifiante peut être complétée par la consultation du rapport de la Fondation mais, d’ores et déjà, il ne me semble pas que le projet de ZAC, si j’en juge par les dernières réalisations de la ville, soit en mesure de répondre efficacement à cette douloureuse problématique, pourtant bien humaine.
Je n’ignore pas non plus que deux collectivités territoriales, celle d’Ile de France et celle de Seine Saint Denis, souhaitent agir sur le coût du foncier afin de favoriser la réalisation de logements sociaux. A ce jour, aucunes informations n’ont été communiquées aux élus sur de telles intentions.
Quoiqu’il en soit, dans sa description actuelle, le projet de ZAC dans sa conception du bâti, sans revenir sur la densification qu’il prévoit, ressemble curieusement aux observations de M. le Délégué général de la Fondation Abbé Pierre et, je puis dire que les habitants de la ZAC du Clos Saint Vincent sont plus dans le profil des 77% de logements « restant [qui] intéressent le tiers des ménages les plus aisé » que dans le profil des demandeurs de logements sociaux.
Par cette remarque, loin de moi l’idée de ne pas accorder aux couches moyennes la possibilité d’accéder aux logements qui lui conviennent mais que l’on ne vienne pas donner comme argument pour justifier la ZAC du Clos aux Biches, le logement social.
Un mot, enfin, sur ce point, à titre personnel, je peux vous compter l’histoire de …….. et de son compagnon, tous deux employés territoriaux donc fonctionnaires. Lors de l’obtention de leur logement social, le bailleur privé a exigé avant l’attribution que les parents se portent garants pendant 10 ans ! Cela se passe de commentaires, M. Doutreligne le dit mieux que moi.
Pour résumer ma pensée et conclure ce long plaidoyer en faveur d’un renouvellement urbain juste et apaisé, la mobilisation des noiséens autour de cette question, ces derniers mois jusqu’aux enquêtes publiques en cours, ont montré, non pas une instrumentalisation politique, ce que d’aucun s’acharne à faire croire, mais bien l’affirmation que de nombreux citoyens entendent s’emparer des choix qui les concernent.
Nous aurions pu penser avoir à faire avec une expression catégorielle autour du cadre de vie de quelques uns et nous avons pu constater une réelle volonté de penser et construire la ville de demain dans son environnement urbain et naturel.
Loin de refuser une urbanisation nécessaire dans l’intérêt général d’un développement durable indispensable, les noiséens qui ont discuté légitimement de ce projet, comme d’autres, en particulier, celui du PLU, ont témoigné d’une maturité citoyenne qui ne peut leur être contestée.
Au moment où le SDRIF se discute dans d’autres instances, je suis de ceux qui considèrent, par exemple, que l’expression de 5000 pétitionnaires ne peut pas être passée sous silence.
Il est clair, à mon avis, que la décision politique appartient aux élus, légitimes le temps d’une élection. Il est clair, tout autant, que la légitimité de la décision politique se doit de s’inspirer de la protestation et des contre-propositions qui s’exercent dans un cadre démocratique sans atteinte aux libertés individuelles et dans le respect des principes constitutionnels.
Je regrette vivement que le débat démocratique indispensable, jusqu’à ce jour, n’est pas permis d’enrichir, de transformer et de faire évoluer le projet municipal afin qu’il soit porté par le plus grand nombre avec le souci d’un réel intérêt général. Je pense sincèrement que c’est une erreur.
J’ai conscience en la circonstance de la difficulté de la mission qui a été confiée à trois commissaires enquêteurs, montrant en cela que Monsieur le Préfet a bien perçu la complexité de la situation noiséenne.
J’espère vivement, Monsieur le Président, Messieurs les Commissaires enquêteurs qu’il vous sera possible d’aider à une prise de décision sereine, juste et raisonnable conforme à l’intérêt public.
 
Vous remerciant de votre patience,
Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l’expression de ma considération.
 
                                                                              Etienne DOUSSAIN
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 


[1] rapport établi par le Conseil Général des Ponts et Chaussées à la demande de Monsieur le Ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer en raison des interpellations successives de plusieurs maires de la ville nouvelle, notamment Noisy le Grand
 
[2]http://www.fondation-abbe-pierre.fr/_pdf/rml_2007.pdf
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